C’est l’un de ces mots que l’on lance souvent dans les conversations, mais que l’on définit rarement. Le cléricalisme désigne cette manière déviante de concevoir le clergé, une déférence excessive et une tendance à lui conférer une supériorité morale. Derrière ce terme, se cachent nombre d’attitudes chez les prélats, si ancrées qu’elles en semblent innées. En résumé, l’Eglise catholique ne vous demande pas votre avis. Elle vous dit ce qu’il faut penser. 

Douces tentations

La mondanité spirituelle est une tentation « douce » et, pour cette raison, « encore plus insidieuse », insiste le Pape. « Elle s'insinue en effet en sachant bien se cacher derrière les bonnes apparences, même dans les motivations religieuses ». Il s'agit, en somme, de l'un de ces « démons polis » qui vont et viennent et « frappent de manière polie ». Et de poursuivre : Le cléricalisme, c’est « vivre son appel de manière élitiste, se renfermer dans son propre groupe et ériger des murs vers l'extérieur, développer des liens possessifs à l'égard des rôles dans la communauté, cultiver des attitudes arrogantes et vantardes à l'égard d'autrui ». Le pape François invite à « retrousser les manches » et « plier les genoux, vous qui le pouvez ! ». Certes, mais il y a du travail. L'entreprise est de taille … (sic !)

Un infantilisme sournois

En 2018, au lendemain de l’éclatement de graves scandales dans l’Eglise catholique, il avait désigné le cléricalisme comme étant l’une des composantes principales de la crise des abus sexuels commis par des membres du clergé.

Cinq ans plus tard, il est plaisant de lire, fait rare, que le Saint-Père retape sur le clou, pour tordre le cou. Même si la démarche spirituelle est plus que certainement téléguidée par le fait qu’un nombre record de fidèles quittent l’Eglise catholique, une faillite convictionnelle monumentale. Ce mea culpa ne doit, toutefois, pas nous faire oublier que l’Eglise catholique est une institution gangrénée par le pouvoir d’influence et l’omerta. Pourquoi ? 

L’explication en est simple : Lorsqu’ils prononcent leurs vœux, les religieux passent de la tutelle du pater familias au Pater Noster. « Le vœu d’obéissance » est alors très mal compris. L’obéissance religieuse devient une obéissance aveugle. Elle se coule dans le moule comme une forme de démission, sans la moindre objection. Le clergé est de facto au-dessus de la mêlée et l’effet domino de son emprise hiérarchique est cascade. Pas sûr qu’une simple lettre du Pape renverse ce paradigme dans les alcôves du pouvoir ecclésiastique. C’est une systémique séculaire qu’il conviendrait d’amender …