Les partis politiques belges élus collectent 93 millions d'euros par an, dont 75 millions d'argent public. Le parti flamand progressiste Vista, le parti citoyen brabançon Pro et les partis citoyens francophones Oxygène et Collectif Citoyen fustigent une partiecratie belge antidémocratique. Les partis politiques ont une fonction importante dans notre société. Ils mobilisent les citoyens autour de leur vision de l'avenir et ils structurent le débat politique. Or, « les nouvelles initiatives politiques ne reçoivent rien en termes de financements et ont donc peu ou pas de chance d'être élues. Et les partis existants n'ont, quant à eux, aucun intérêt à changer ce système qui les favorise », peut-on lire sur le crowdfunding www.stopparticratie.be

Un avantage anti « concurrentiel »

Seuls les partis ayant un élu à la Chambre des représentants reçoivent des financements publics, alors que l'argent n'est pas destiné au fonctionnement du parlement, mais doit être utilisé en dehors. Il s'agit d'un montant forfaitaire complété par une somme par vote. Ainsi, la majeure partie des revenus des partis politiques dépend des résultats électoraux. Plus ils obtiennent de voix, plus ils reçoivent d'argent. « La loi actuelle est discriminatoire. Les voix des petits partis n’ont aucune valeur financière. Il existe également une discrimination entre la Flandre et la Wallonie en raison de la différence du seuil de financement effectif. Le seuil électoral de 5 % s’applique à l’ensemble du pays, mais ce n’est que dans les provinces flamandes d’Anvers (24 sièges) et de Flandre orientale (20 sièges) que l’on est assuré d’avoir un représentant élu au niveau fédéral et donc un financement dès 5 %. En revanche, dans les deux plus grandes provinces wallonnes, le Hainaut (17 sièges) et Liège (14 sièges), 5 % des voix ne suffisent pas. Pour être sûr d’y obtenir un siège, il faut déjà 5,88%, voire 7,14% des voix pour obtenir un financement. Ainsi, si le seuil électoral est le même, le seuil de financement ne l’est manifestement pas », précise Jan Wostyn, coprésident Vista & Porte-parole pour Oxygène dans une carte blanche publiée dans le Trends Tendances.

« Les règles actuelles datent de plus de 30 ans et ont été mises en place pour lutter contre la corruption et l'influence de "généreux donateurs". Cependant, avec le temps, la balance s'est de nouveau déséquilibrée. Par électeur, les partis politiques belges reçoivent plus du double des subventions que les partis danois ou suédois, et quatre fois plus que les partis politiques néerlandais ».

Une tendance à l’oligarchisation

Sur LinkedIn, Marc Verdussen, avocat au barreau de Bruxelles et professeur en droit constitutionnel analyse : « sans se prononcer sur l’action judiciaire introduite, il est incontestable qu’en subordonnant l’octroi de la dotation fédérale à la condition minimale que le parti ait au moins un siège à la Chambre des représentants, la législation belge sur le financement public des partis politiques ne favorise pas l’émergence de nouvelles formations dans la représentation parlementaire. Cette règle, conjuguée à d’autres règles ou pratiques, qui touchent parfois au mode de scrutin lui-même (comme le seuil électoral fixé à 5 %), conduit à favoriser une tendance à l’oligarchisation de la démocratie belge ». 

Et de lancer l’idée suivante : « logiques différentes de financement pourraient coexister : un financement permanent et général des partis politiques les plus représentatifs – c’est le système actuel – et un financement ponctuel et spécifique des campagnes électorales de tous les candidats. Mais cela ne pourrait raisonnablement se faire qu’à moyens budgétaires constants, ce qui conduirait à une diminution inévitable des dotations aux partis, telles qu'elles sont versées sur la base de la législation actuellement en vigueur ».

La plainte a été introduite par les quatre « petits » partis à Bruxelles. Ils espèrent que le tribunal posera une question préjudicielle à la Cour constitutionnelle sur une éventuelle « discrimination » à leur encontre qui serait effectivement inconstitutionnelle. Une décision sur le fond pourrait toutefois n'intervenir qu'après les prochaines élections de 2024.