Rencontre avec Yves Oschinsky

Avec l’implication de l’Iran, un nouveau cap a été atteint dans cette poudrière du Proche et du Moyen-Orient ! Les tensions entre l’Iran et Israël sont le résultat d’une combinaison complexe de facteurs historiques, religieux et géopolitiques qui entraînent des répercussions régionales et internationales. En l’absence de progrès vers une solution négociée (qu’on espère depuis près de 50 ans !), le risque de nouveaux affrontements reste élevé, ce qui souligne l’importance d’une gestion prudente des tensions et d’un dialogue constructif entre l’Iran et Israël ainsi qu’avec leurs alliés et partenaires locaux ou internationaux… Attention, on marche sur des œufs !

Et au milieu de l’envoi de drones et de missiles d’intimidation entre Israéliens et Iraniens, toujours sur fond de drame humanitaire à Gaza, on en avait presque oublié le sort des otages israéliens détenus par le Hamas… Heureusement, les négociations semblent reprendre grâce à l’action diplomatique du Qatar et de l’Egypte.

La libération des otages demeure la condition sine qua non d’une amélioration des conditions à Gaza, c’est également ce qu’appelle de ses vœux Yves Oschinsky, président du Comité de coordination des organisations juives de Belgique (CCOJB) depuis un an et demi. Fort de son expérience d’avocat, de bâtonnier du barreau de Bruxelles et encore de président de l’Institut des Droits de l’Homme du barreau de Bruxelles, Yves Oschinsky met ses engagements et son expérience au service de la communauté juive en mesurant les défis que cela représente, plus particulièrement encore dans la situation géopolitique actuelle et tenant compte de la montée de l’antisémitisme en occident. Pan l’a rencontré :

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Le CCOJB, c’est quoi ?

Le Comité de Coordination des Organisations Juives de Belgique (CCOJB) fédère, soutient et met en valeur les organisations juives de Belgique en leur permettant de s’exprimer d’une seule voix. Nous fonctionnons autour d’un comité directeur composé de 10 bénévoles et d’un Conseil d’Administration où siège un membre de chaque organisation.

La présidence, comment et pourquoi ?

Pour accepter cette responsabilité, je me suis penché sur cette institution, ses statuts, ses objectifs et ses actions. J’ai très vite compris qu’ils correspondent en tout point à ce que j’aspire et que j’accomplissais déjà à titre individuel tant en ce qui concerne la lutte contre l’antisémitisme, la transmission de la mémoire que le soutien à l’existence d’Israël.

Quelles sont vos actions ?

Nous avons beaucoup de réunions avec les présidents de parti, les parlementaires, les gouvernements régionaux et fédéraux, notamment avec la secrétaire d’Etat à l’Egalité des Chances (ndlr : l’écolo Marie-Colline Leroy). Nous préconisons une profonde stratégie politique pour lutter contre l’antisémitisme mais les choses évoluent trop lentement sans un véritable coordinateur. Une cellule de veille avait été convenue en 2004, une nouvelle avancée avait été pensée en 2022 avec Sarah Schiltz et un mécanisme interfédéral de lutte existe désormais depuis le 15 janvier dernier… Mais rien n’a évolué réellement ! On se retrouve bien à 60 autour d’une table avec tous les acteurs politiques, on échange des idées, on partage des réflexions mais il n’y toujours aucune coordination… et nous sommes censés nous réunir à nouveau le 16 septembre prochain… Tout cela reste très stérile !

Par ailleurs, nous avons une émission sur Radio Judaica et nous organisons des marches le dimanche en soutien des otages mais sur lesquelles nous ne pouvons même pas communiquer par souci de sécurité ! 

Le politique belge prend-il des responsabilités ?

Il n’y clairement pas de pilote dans l’avion ! Et pourtant, c’est une exigence de l’Europe que de se pencher activement sur la question. En 2023, 19 pays ont déjà agi en ce sens… la Belgique reste parmi les derniers de la classe, il n’y a manifestement pas de volonté politique ! j’espère pouvoir le faire comprendre aux différents partis.

Etes-vous soutenu par la presse traditionnelle ?

La presse prend contact avec moi lorsque l’actualité le demande mais ce n’est manifestement pas sa priorité. Lorsque j’ai envoyé une lettre ouverte au Premier ministre pour lui faire part de mon inquiétude sur le positionnement belge après les massacres commis par le Hamas (ndlr : avec pour simple réponse jusqu’ici, un laconique accusé de réception…), j’ai contacté la presse pour en faire l’écho. La RTBF a été plutôt sournoise, La Libre Belgique a refusé et Le Soir m’a informé qu’il ne publiait plus de carte blanche… !

La notion d’antisémitisme a-t-elle évolué ?

Pendant 2000 ans, on n’aimait tout simplement pas les Juifs. Après la Shoa, la honte s’est installée. Il y également la notion d’antisionisme qui a souvent été aussi mal comprise que mal utilisée. Aujourd’hui, d’aucun l’invoque volontairement dans le vrai sens du terme, c’est devenu l’antisémitisme des islamistes ! Chez nous, il règne une polarisation incroyable initiée par les responsables politiques. Ils ont été les premiers à importer le conflit à Gaza en le plaçant en premier thème de campagne électorale.

Quelles sont vos préoccupations d’aujourd’hui ?

L’objectif majeur reste aujourd’hui la libération des otages ! De manière plus générale la sécurité des Juifs est également préoccupante. Ne nous voilons pas la face, il y a des Juifs qui quittent la Belgique. Lorsqu’ils s’installent en Israël par idéal, c’est un choix que j’applaudis. Lorsqu’ils le font par dépit ou par peur, je le déplore car c’est un constat d’échec. C’est pourquoi nous devons tout faire pour que la population juive se sente bien en Belgique. Cela passe entre autres par la mise en place d’une politique qui garantisse bien la sécurité des Juifs. C’est un point crucial. Les pouvoirs publics doivent donc s’investir davantage dans ce dossier. Il ne faut pas être juriste pour savoir que c’est une prérogative de l’Etat de garantir la sécurité de ses citoyens.

Un vœu ?

J’espère que les résultats des élections apporteront enfin un peu d’empathie et une véritable stratégie.

... Mais alors, pour qui voter ?