La matière de l’asile échappe aux États

Potemkine, pourquoi ? Depuis une vingtaine d’années, la Cour européenne des droits de l’homme s’est emparée de la question de l’asile. Cela peut surprendre, car le concept même d’asile est étranger à la Convention européenne des droits de l’homme dont la juridiction de Strasbourg est la gardienne. N’importe : la Cour, dans un geste magnifique et sublime, a décrété sa compétence pour, en l’espace de quelques années, façonner un Frankenstein jurisprudentiel au terme duquel toute personne interceptée, par exemple en Méditerranée, doit être amenée sur le sol européen, pour y exercer les droits individuels que lui reconnaît - selon la Cour, et seulement selon la Cour - la Convention du droit des Européens.

Une immigration délirante

L’apothéose de cette jurisprudence délirante est l’arrêt Hirsi, rendu en 2012, qui a révolutionné l’asile en Europe. Tandis qu’avant cet arrêt, le but du clandestin était de ne pas se faire intercepter en Méditerranée, depuis cet arrêt son objectif est l’interception, car cela implique automatiquement un ferry vers l’Europe.

Cet arrêt ouvrit les vannes de l’immigration délirante que nous connaissons jusqu’à nos jours. Des millions de réfugiés se mirent en marche, depuis les quatre coins de la planète, pour entrer en Europe par la porte de l’Afrique. Avec de menus effets pervers qui ne semblent pas émouvoir la sentencieuse Cour de Strasbourg. D’abord le fait que des milliers de candidats au ferry européen se noient, parfois à quelques centaines de mètres des côtes de l’Afrique, précisément parce qu’ils prennent la mer dans des embarcations à peine flottantes, dans l’espoir de rencontrer un navire FRONTEX ou celui de l’une des multiples ONG aux agissements irresponsables et criminels qui sévissent en Méditerranée.

Des réseaux mafieux

Surtout, la jurisprudence extrémiste de Strasbourg a créé - littéralement : créé - d’immenses réseaux mafieux de transit entre l’Afrique et l’Europe. Dans son rapport sur les risques 2017, l’agence européenne FRONTEX déplorait déjà que la jurisprudence délirante de la Cour de Strasbourg fasse la fortune des passeurs et mafias esclavagistes en l’Afrique : ‘toutes les parties impliquées dans opérations de sauvetage en en Méditerranée aident involontairement les criminels à atteindre à atteindre leurs objectifs à moindre coût, à renforcer leur modèle d'affaires en augmentant les chances de succès. Les migrants et les réfugiés - encouragés par les récits de ceux qui ont réussi le passage - tentent la traversée périlleuse, car ils sont conscients de et comptent sur l'aide humanitaire pour atteindre l'Europe.

Open borders

Cette réalité signifie que nous vivons dans un régime de frontières ouvertes (open borders). Non seulement en fait, mais en droit. Merci Strasbourg ! Aussi longtemps que la cité de Carthage menaçait la République de Rome, l’orateur Caton concluait chacune de ses interventions au Sénat romain par ces mots : Carthago delenda est - Carthage doit être détruite - tant cette menace lui paraissait l’emporter sur toutes les autres. Décor planté, le divorce entre l’extrémisme des juges sans visage de Strasbourg et la volonté démocratique de nos populations - Italie, Suède, Europe centrale, Europe de l’Est - est devenu si abyssal, que la question du rôle de la Cour de Strasbourg mérite d’être posée.