Des Alpes à la Valpelinne. 

Valpelinne. Cette vallée latérale de la vallée d’Aoste s’étend de la vallée du Grand-Saint-Bernard jusqu’à Gignod et jouxte le Valais au col Collon. Cette vallée se situe au pied du Grand Combin, même si ce dernier se trouve entièrement en territoire suisse.

Ce livre est l’étonnante histoire de ces prêtres montagnards partis à l’assaut des cimes ! Une histoire de l'alpinisme ecclésiastique du début du XXe siècle. L'auteur retrace les exploits de ces prêtres marcheurs qui ont parcouru les montagnes, du Valais au Val d'Aoste, en passant par les Alpes françaises, gravi des sommets, auxquels certains ont donné leur nom, et ouvert de nombreuses voies.

Le pasteur zurichois Josias Simlerc (1530-1576) fut l’un des premiers. Historien et géographe, il est l’auteur de nombreuses publications (on lui doit même l’appellation générique « Alpes » venant du mot alpinum, désignant le blanc des neiges éternelles). Au rang des précurseurs, on peut également citer Placidus a Spescha (1752-1833) originaire des Grisons. Il réalisa de nombreux voyages de découvertes dans les Grisons ainsi qu’au Tyrol. Entre 1782 et 1806, il gravit de nombreux 3000 autour du Saint-Gothard et dans le massif du Tödi. Cependant, l’histoire de nos « prêtres alpinistes » va véritablement commencer par l’ascension du Mont Vélan en 1779. C’est à un ecclésiastique et botaniste suisse, Maurent-Joseph Murith (1742-1818), que l’on doit cette prestigieuse ascension.

Les Gnifetti, Coutin, Carrel, Perroin marqueront de leurs exploits les hauts sommets. D’autres, comme Maquinaz, ne se sont pas forgé un palmarès alpin remarquable, mais ils furent de bons alpinistes. Cet écrivain, conteur, humoriste, fut l’un des fondateurs de l’almanach Le Messager Valdôtain.  Ses écrits, qu’il signait Jacquême, étaient pleins d’originalité et de verve. Il a fait la fortune de l’almanach et le délice des lecteurs.

Hospices, monastères, chapelles et oratoires, statues de saints, statues de vierges, croix de bois, croix de pierre ou de fer… Les témoignages religieux ne sont pas rares dans les Alpes. Ils s’élèvent parfois à certains toponymes : col du Curé, col du Moine, Doigt de Dieu, Apôtres, Grand Capucins… 

Oubliant pour un temps soutanes, sonnettes, cornettes et nonettes, nos joyeux drilles vont aller au plus près de Dieu. 

            — Là-haut, dira l’un d’eux, je fais d’abord attention où je mets les pieds pour ne pas me casser la figure, car Dieu ne viendra pas me rattraper par les cheveux si je fais une erreur. La vie est entre ses mains et entre les miennes aussi ! 

Bernard Marnette nous mène à la rencontre de ces « curés marcheurs » qui écrivirent une page peu connue de l'histoire de la conquête des Alpes, celle d'un « alpinisme ecclésiastique ».

En 1973, Samivel publiait Hommes, Cimes et Dieux, un essai remarqué sur l'étonnant rapport entre les hauteurs et les spiritualités à travers le monde. Ici l'ambition est plus modeste, puisque ce livre ne s'intéresse qu'à un seul Dieu - celui de la foi chrétienne - et pour l'essentiel à un seul lieu : le coeur de nos Alpes, du Valais au val d'Aoste et aux Alpes françaises.

L’ouvrage offre au lecteur un regard particulier sur la Valpelline, dans le val d'Aoste, dont les prêtres locaux furent les premiers à gravir nombre de sommets, jouant un rôle exemplaire dans cette belle histoire. Mais toute médaille a sa patine. Le temps passé en montagne ne permettait pas, non plus, une disponibilité suffisante pour le paroissien. Nombre de prêtres se faisaient ainsi rappeler à l’ordre par leur supérieur ou seront privés de leurs indemnités. Ils furent nombreux, ces prêtres de montagne, à entrer en conflit avec leur hiérarchie. Sans doute, ces curés alpinistes ont-ils trouvé en haute montagne la paix et la tranquillité nécessaires à leur recueillement et à leurs propres questionnements…

Ce livre s'adresse non pas à l'alpiniste qui regarde plus loin, mais à celui qui regarde plus haut, par-delà les cimes ! 

Passionnant !

Curés alpinistes – Bernard Marnette – Éditions Nevicata – 2023 – ISBN 9782875231956